Pendant que le bilan s’alourdit en Rhénanie à 156 morts, les inondations gagnent la Bavière, le long du Danube. Passau et sa région sont menacés. Des milliers de personnes sont toujours évacuées, des dizaines de bâtiments détruits, des centrales d’épuration sous l’eau : l’eau potable manque, l’électricité n’est pas rétablie, les lignes téléphoniques aussi sont coupées. Même les centrales thermiques de la région sont stoppées du fait des masses d’eau. De nombreuses surfaces agricoles ont été également emportées, les récoltes sont perdues.
C’est l’Allemagne très prospère et soucieuse de sécurité qui découvre ainsi que le réchauffement climatique est global. En 2002, les « inondations du siècle », qui avaient emportées 23 personnes, avaient surtout touchées les régions de l’Est, pauvres et moins bien équipées. Les inondations du siècle deviennent des inondations d’une vingtaine d’années. En même temps, d’autres régions rurales allemandes subissent de nouveau un déficit d’eau et une baisse des rendements par sécheresse. Les masses d’eau dévastent aussi les Pays Bas. Une polémique est née : une ville allemande accuse les autorités néerlandaises d’avoir refusées d’ouvrir des écluses de son côté, entraînant la rupture d’une digue allemande. Elles ont emporté une trentaine de vies en Belgique, où les destructions sont aussi étendues qu’en Allemagne.
La pandémie a rappelé que nous appartenons à l’ordre du vivant, c’est à dire que nous mourrons. Elle a aussi rappelé que les sociétés incapables de solidarité n’ont que l’autoritarisme pour réagir, et que les systèmes de Santé doivent être gérées non pour le beau temps, mais pour les temps de crise.Les épisodes meteréologiques violents et leurs destructions se multiplient, en Europe également. Longtemps, on a pu se dissimuler l’état réel des choses en s’appuyant sur l’apparence de la stabilité du monde autour de soi. Mais les conséquences du réchauffement nous rattrapent.
Pourtant, les politiques de relance d’après Covid ne s’occupent pas d’infrastructures d’irrigation pour les régions en risque de sécheresse, de lutte contre les inondations, contre le relèvement du niveau des eaux. Il faut relancer le tourisme, en avion ou en bateau de croisière, relancer les échanges internationaux à coup de porte conteneurs géants, relancer l’illusion d’une bulle protectrice, d’un monde comme avant.
Face à de telles transformations, il y a toujours les phases habituelles : déni, colère, résignation, action. La phase du déni a bien trop durée. Elle s’est accompagnée, par angoisse, d’une accélération des comportements à risque, comme un alcoolique, qui, en attente d’un résultat d’analyse qui l’enverra en désintoxication, vide les bouteilles chez lui.La phase de la colère est mauvaise conseillère. Elle peut porter au pouvoir des Trump, des Bolsonaro, des Modi, des Johnson, qui n’ont pas d’autre mission que de garantir le statu quo pour certaines classes, mais manient les boucs émissaires pour ne pas parler des enjeux majeurs de l’heure.La résignation s’accompagne de l’abstention. A quoi bon lutter? Nous somme fichus. Et pourtant, c’est de la résignation que naît la volonté d’agir, de se battre, de survivre.
Il faut voir l’abîme pour s’en écarter. Ces 20 dernières années ont vu de nombreux moments cruciaux ratés. L’idéologie imbécile de la stabilité budgétaire et du moins d’Etat n’a pas permis de garantir la collectivité sûre, prospère, paisible. Elle nous a exposé au virus, elle nous a exposé aux destructions du climat.
Arrêter d’utiliser des sacs en plastique ne réponds pas aux enjeux du moment : c’est le système qui est en jeu, pas la responsabilité individuelle.
En septembre, l’Allemagne vote. Face au danger de changer le système, celui-ci a concentré la campagne sur des sujets marginaux et accessoires, inventant artificiellement un clivage.
L’an prochain, nous votons. La même mécanique est en cours.
Il est temps de sortir des phases nécessaires à l’acceptation de la nouvelle situation, et d’embrasser l’ère qui vient, conscients de nos responsabilités, prêts à agir.